Une forte concentration dans les "Magnificent Seven" accentue les risques
La forte exposition des investisseurs aux "Magnificent Seven" (les sept plus grandes entreprises technologiques américaines) signifie que, lors de périodes de stress ou de volatilité accrue sur les marchés, ces titres sont souvent parmi les premiers à être vendus. En situation de tension, les investisseurs ont tendance à vendre ce qu’ils peuvent plutôt que ce qu’ils voudraient, ce qui accentue encore la volatilité de ces actions très détenues. En conséquence, les portefeuilles fortement exposés à ces valeurs peuvent subir des fluctuations amplifiées lors des périodes d’instabilité.
Compte tenu du poids massif du marché américain par rapport aux autres marchés mondiaux, même un déplacement modeste des capitaux vers des marchés internationaux sous-évalués pourrait avoir un effet significatif sur la valorisation de ces marchés plus petits. Les investisseurs qui choisissent dès maintenant la diversification se positionnent ainsi de manière stratégique pour profiter de ces dynamiques globales potentiellement puissantes.
Valorisation, politique et devises : des vents contraires pour les actions américaines
Au-delà du risque de concentration, les actions américaines restent historiquement chères, avec un ratio cours/bénéfice prévisionnel d’environ 22 — bien au-dessus de la moyenne historique. Ce niveau se situe même au 93e percentile sur les vingt dernières années, ce qui signifie que le marché américain n’a été aussi cher que dans 7 % des cas.
Par ailleurs, l’environnement politique américain, de plus en plus instable (conflits commerciaux récurrents, incertitudes réglementaires), érode l’attrait du marché pour les investisseurs internationaux.
Pour les investisseurs européens, la faiblesse du dollar complique encore davantage les choses. Cette tendance devrait se poursuivre en 2025, ce qui réduit mécaniquement les rendements des investissements en actions américaines exprimés en euros, ajoutant un niveau supplémentaire de complexité et de risque.
À l’inverse, un dollar plus faible représente un puissant soutien pour les actions des marchés émergents. Historiquement, ces marchés bénéficient d’un dollar faible, qui renforce leur compétitivité, attire les capitaux étrangers et allège le poids de leur dette. Avec la poursuite attendue de cette tendance et des fondamentaux économiques en amélioration, les actions des marchés émergents apparaissent aujourd’hui particulièrement attractives.
La stratégie BABA : "Buy Anything But America"
Surpondérer l’Europe : une transformation budgétaire historique
L’Europe connaît actuellement son plus vaste plan de relance budgétaire depuis des décennies, porté notamment par l’ambitieux programme de modernisation et d’infrastructures de 500 milliards d’euros lancé par l’Allemagne. Cet investissement structurel de long terme n’est pas encore pleinement intégré dans les cours de Bourse, ce qui offre une fenêtre d’opportunité intéressante.
Les actions européennes ont d’ailleurs surperformé celles des États-Unis cette année, ce qui amène certains investisseurs à se demander si cet élan est déjà intégré. Or, l’ampleur et la durée de ces mesures suggèrent qu’un potentiel d’appréciation important subsiste.
Dans notre analyse précédente, nous avions mis en avant le thème de "l’indépendance européenne", qui continue à porter ses fruits. Au deuxième trimestre, ce thème a nettement surperformé le marché européen dans son ensemble, avec un rendement de 9 % pour notre sélection thématique, contre 4,1 % pour le Stoxx 600. Cela souligne la pertinence et le potentiel de l’investissement dans la résilience et l’autonomie stratégique de l’Europe.
Les secteurs des infrastructures, des équipements industriels, de la construction, des énergies renouvelables et de la défense restent porteurs, avec des opportunités particulièrement intéressantes en Espagne, en Allemagne et en Italie. L’Allemagne profite pleinement de ses investissements massifs dans ses champions industriels et technologiques ; l’Espagne bénéficie d’une forte dynamique économique, notamment dans les banques et les énergies vertes ; l’Italie affiche des valorisations attractives dans les secteurs financier, énergétique et des infrastructures, soutenue par des fondamentaux économiques en amélioration.
Secteurs à privilégier : nous restons particulièrement confiants sur les valeurs financières, notamment les banques, grâce à des valorisations attractives, des bénéfices solides et des dividendes stables. L’énergie verte et les services publics offrent une croissance structurelle portée par la transition énergétique européenne. Les secteurs industriels et des infrastructures bénéficieront directement des plans de relance en cours, renforçant la visibilité sur les bénéfices.
Risques à surveiller : malgré ce potentiel, les investisseurs doivent rester attentifs à certains défis européens : fragmentation politique au sein de l’UE, mise en œuvre plus lente que prévu des plans de relance, et tensions inflationnistes prolongées pouvant affecter les marges des entreprises.
Surpondérer le Japon : une mutation discrète mais profonde
Le Japon offre également un cas de diversification convaincant. Longtemps associé à une faible gouvernance d’entreprise et à des rendements limités pour les actionnaires, le pays connaît une transformation notable. Les entreprises japonaises se concentrent davantage sur la rentabilité, l’augmentation des dividendes et la valorisation de l’actionnaire.
Les actions japonaises restent raisonnablement valorisées, avec un ratio de 15 fois les bénéfices attendus, soutenues par une politique monétaire accommodante de la Banque du Japon. Ces réformes, combinées à des fondamentaux solides, font du Japon une option intéressante pour diversifier un portefeuille global. Il peut toutefois être préférable de cibler des entreprises tournées vers le marché intérieur, ainsi que certains acteurs de la défense, car une appréciation du yen pourrait peser sur les exportateurs traditionnels.
Risques à surveiller : exposition du Japon au ralentissement mondial, sensibilité à un yen fort pouvant affecter les exportations, et risque que les réformes de gouvernance ne tiennent pas leurs promesses.
Surpondérer les marchés émergents : tirer parti de la faiblesse du dollar
Plusieurs marchés émergents présentent un fort potentiel de croissance à des valorisations attractives (environ 13 fois les bénéfices attendus). Des pays comme l’Inde, le Brésil, l’Indonésie ou le Mexique disposent d’économies domestiques solides, d’une dynamique bénéficiaire en amélioration, et de monnaies plus stables.
La faiblesse attendue du dollar renforce l’attrait de ces marchés, améliorant les rendements ajustés au change pour les investisseurs européens et renforçant l’intérêt d’une diversification géographique.
Risques à surveiller : les marchés émergents restent sensibles aux changements de sentiment des investisseurs mondiaux, à l’instabilité politique et aux virages de politique économique. Les tensions géopolitiques et la volatilité des matières premières représentent également des risques à ne pas négliger.
Chine : une approche tactique et sélective
La Chine offre une opportunité plus prudente. Avec des valorisations historiquement faibles (environ 10 fois les bénéfices attendus), le potentiel de reprise est réel. Mais les incertitudes politiques, les tensions géopolitiques et les défis structurels imposent une approche tactique et sélective, en tenant compte d’une forte volatilité.
Il est conseillé de se concentrer sur les secteurs explicitement soutenus par les politiques publiques chinoises : énergies vertes, véhicules électriques, industrie avancée, infrastructures numériques et technologies. Mieux vaut également privilégier les entreprises solidement implantées sur leur marché intérieur.
Risques à surveiller : les investisseurs doivent suivre de près les risques réglementaires, les tensions commerciales avec les États-Unis, les fragilités du secteur immobilier et la confiance des consommateurs — autant de facteurs qui influenceront fortement la trajectoire économique de la Chine et le sentiment des marchés.