Nvidia, épisode 2 : les résultats trimestriels confirment-ils la poursuite du boom de l’IA ?
Ruben Dalfovo
Investment Strategist
Points clés
Nvidia a une nouvelle fois dépassé les anticipations, portée par une demande toujours très forte dans les centres de données dédiés à l’IA.
La guidance d’environ 65 milliards USD de chiffre d’affaires pour le prochain trimestre continuerait d’alimenter le récit d’une expansion massive de l’IA jusqu’en 2026.
La forte concentration de clients, un environnement réglementaire plus strict et une valorisation particulièrement élevée constitueraient désormais les principaux facteurs de risque.
Contexte : un seul résultat, des effets mondiaux
Quand une entreprise dépasse les 4 000 milliards USD de capitalisation et détient la plus grande pondération du S&P 500, sa publication trimestrielle influence mécaniquement les indices globaux. Nvidia est aujourd’hui au centre de la thématique IA et au cœur des portefeuilles indiciels détenus par de nombreux épargnants.
Juste avant les résultats, l’action a clôturé le 19 novembre à 186,52 USD, en hausse de 2,9 % sur la journée mais en repli sur la semaine, les opérateurs réduisant légèrement leur exposition à l’IA. Après l’annonce, le titre a gagné environ 5 % dans les échanges post-clôture, signe que le sentiment de marché reste très dépendant de cette valeur.
La question qui se pose alors est simple : que révèlent ces résultats sur la dynamique de l’IA, sur le leadership futur du marché et sur la part de notre épargne déjà exposée à ce thème ?
Dans le détail du trimestre : activité, marges et structure de la demande
Le chiffre d’affaires du troisième trimestre s’élève à 57 milliards USD, en hausse de 62 % sur un an et au-dessus des attentes d’environ 55 milliards USD. Le bénéfice ajusté par action atteint 1,30 USD, supérieur au consensus de 1,26 USD.
La locomotive reste les centres de données :
51,2 milliards USD, soit +66 % sur un an et près de 90 % des ventes totales. Les géants du cloud et les spécialistes de l’IA continuent d’investir massivement dans leurs infrastructures, et Nvidia demeure un fournisseur incontournable de processeurs et systèmes hautes performances.
Les marges témoignent d’une rentabilité exceptionnelle :
marge brute non-GAAP : 73,6 %, légèrement inférieure à l’an dernier mais en hausse séquentielle,
résultat net : 31,9 milliards USD, soit +65 % sur un an.
Sur les neuf premiers mois de l’exercice fiscal 2026, Nvidia a redistribué environ 37 milliards USD aux actionnaires (dividendes + rachats), avec plus de 60 milliards encore autorisés. Le secteur de l’IA permettrait ainsi à Nvidia d’investir lourdement tout en maintenant une génération de trésorerie très élevée.
La guidance était l’élément le plus scruté :
chiffre d’affaires attendu au T4 : 65 milliards USD (+/- 2 %),
marge brute non-GAAP : autour de 75 %.
En clair, la demande pour les nouvelles puces Blackwell resterait extrêmement élevée et Nvidia conserverait une capacité notable à maintenir ses prix.
Nvidia comme thermomètre du cycle IA
Nvidia constitue aujourd’hui l’indicateur le plus direct des dépenses mondiales en infrastructures IA. Elle fournit Microsoft, Amazon, Alphabet et de nombreuses entreprises spécialisées. Sa visibilité commerciale refléterait donc la confiance des grands acheteurs jusqu’en 2026.
Selon la direction, l’intérêt pour les nouveaux systèmes Blackwell serait « hors normes », avec une visibilité commerciale estimée à près d’un demi-billion de dollars sur les prochaines années.
Les clients prévoiraient des modèles plus complexes et une utilisation accrue, plutôt qu’un ralentissement.
La nature de la demande évoluerait progressivement :
phase 1 : entraînement des modèles, irrégulier et lié aux lancements majeurs,
phase 2 : inférence, c’est-à-dire l’exploitation quotidienne des modèles dans la recherche, la publicité, les applications bureautiques ou industrielles.
Les activités logicielles et réseau renforcent également la position de Nvidia. À mesure que les logiciels et services prennent davantage de place, la société se rapproche d’un modèle de plateforme IA, moins cyclique qu’un fabricant de puces traditionnel.
Les principaux points de vulnérabilité
Valorisation élevée
Avec une capitalisation dépassant à nouveau 4 000 milliards USD, l’action intègre plusieurs années de croissance rapide. La moindre déception pourrait entraîner des variations marquées.Concentration des clients
Une large part du chiffre d’affaires provient de quelques acteurs majeurs (hyperscalers et laboratoires IA).
Un report d’investissement, un durcissement sur les prix ou un recours à des solutions internes pourrait ralentir la dynamique.Contraintes réglementaires et géopolitiques
Les restrictions américaines limitent les exportations vers la Chine et pourraient être resserrées.
Par ailleurs, l’accès à l’électricité, aux terrains et au réseau électrique limite la capacité mondiale à construire des centres de données au rythme souhaité.Risque narratif
Les discussions autour d’une possible « bulle IA » persistent.
Lorsqu’un titre est aussi suivi, tout changement de perception peut provoquer des mouvements rapides.
Comment interpréter Nvidia : un signal, pas une méthode
Comparer la réaction du cours avec l’ampleur de la surprise : un mouvement disproportionné peut signaler de l’exubérance ou de la nervosité.
Observer la fréquence des mentions liées aux clients stratégiques : une dépendance croissante augmente le risque spécifique.
Suivre l’évolution de la part liée aux centres de données : une diversification progressive réduirait l’exposition à un seul thème.
Surveiller les repères de valorisation (PER anticipé, rendement de trésorerie) par rapport à l’historique.
Conclusion : ce que ce trimestre révèle réellement
Nvidia a passé un nouveau test de solidité dans un contexte d’euphorie autour de l’IA.
Chiffre d’affaires, bénéfices et prévisions indiquent un écosystème en expansion, sans signe de ralentissement immédiat.
Mais derrière la performance, un message structurel ressort : une part croissante de la performance des marchés mondiaux dépend d’une seule entreprise et d’une seule histoire.
La question n’est donc pas seulement « faut-il s’intéresser à Nvidia aujourd’hui ? », mais plutôt :
« quelle proportion de mon épargne dépend déjà de cette entreprise, directement ou via les fonds indiciels ? »
Si Nvidia continue de déjouer la gravité, elle pourrait soutenir les marchés encore un moment.
Si elle trébuche un jour, la surprise viendrait surtout du fait que beaucoup avaient oublié que même les valeurs les plus fortes peuvent corriger.
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