Tout est dit

Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
Ce sera soit une hausse de 75 points de base, soit une hausse de 100 points de base. Mais comme la Réserve Fédérale américaine n’aime en général pas surprendre le marché, nous tablons plutôt sur une hausse de 75 points de base. La probabilité d’une hausse de 100 points de base est faible, à ce stade. Il faudra surveiller surtout deux éléments ce soir : l’évolution des dots plots – ce fameux graphique qui représente les estimations du FOMC concernant l’évolution des taux d’intérêt – et les prévisions concernant le PCE core – la mesure de l’inflation préférée par la banque centrale américaine. Nous pensons que Jerome Powell adoptera un ton plutôt « hawkish » (en faveur d’un durcissement monétaire accentué). Dans les salles de marché, beaucoup d’intervenants laissent entendre que la banque centrale américaine est frustrée que les conditions financières ne soient pas plus restrictives. Un ton « hawkish » serait donc cohérent. En outre, tout porte à croire que l’inflation va être encore volatile pendant de longs mois. C’est un autre élément qui plaide pour que Powell soit ferme concernant la hausse des taux. Nous parions sur le fait que le dollar américain va encore sortir vainqueur de cette séance.
- Il est toujours difficile de faire des prévisions macroéconomiques. Mais ça l’est encore plus dans la période actuelle. L’indice des prix à la production en Allemagne est ressorti en progression de 7,9% sur un mois. Le consensus tablait sur une augmentation beaucoup plus faible, de l’ordre de 2,4% (contre 5,3% en juillet). Sur un an, la hausse atteint 45,8%. C’est du jamais vu. Tout cela à cause du bond de la facture d’électricité. A ce stade, il ne fait aucun doute que l’économie allemand soit entrée en récession dès le troisième trimestre de cette année. En outre, Moody’s a publié hier une étude intéressante détaillant les pays les plus vulnérables en cas de coupure totale d’approvisionnement de gaz russe en Europe (c’est un scénario crédible). On retrouve dans la liste la Hongrie, la Slovaquie, l’Italie, la République Tchèque, l’Allemagne et l’Autriche. La Hongrie est le pays le plus vulnérable en théorie puisque 24% de ses besoins énergétiques sont couverts par la Russie. Mais le risque réel est plus faible étant donné les bonnes relations entre Moscou et Budapest. Pour les autres pays de la liste, le fait qu’ils aient réussi à diversifier leurs approvisionnements devrait permettre d’éviter un scénario catastrophe. C’est une bonne nouvelle dans un environnement économique plutôt très dégradé.
- Nous pourrions avoir une mauvaise surprise bientôt sur les paires en JPY. L’inflation en août est ressortie à 3% sur un an au Japon. C’est nettement au-dessus de la cible située à 2% par la Banque du Japon (BoJ). Pour l’instant, la BoJ continue sa politique monétaire ultra-accommodante (notamment la politique de contrôle de la courbe des taux). Mais c’est une anomalie de politique monétaire alors que toutes les autres banques centrales augmentent leurs taux (à quelques exceptions près). La politique ultra-accommodante japonaise explique en partie la baisse accentuée du JPY depuis le début de l’année. De plus en plus d’intervenants de marché se demandent pendant combien de temps encore la BoJ va pouvoir faire bande à part. Il y a un risque que la banque centrale soit contrainte de durcir sa politique monétaire suite à l’envolée de l’inflation. Un tel revirement a peu de chances de survenir cette semaine (la BoJ se réunit pour deux jours aujourd’hui et demain). Mais c’est un risque réel qui pourrait se matérialiser d’ici la fin de l’année. Il n’est pas du tout intégré au niveau du marché des changes. Les fonds spéculatifs sont vendeurs de yens dans des proportions extrêmes. Cela signifie qu’en cas de revirement inattendu de la politique monétaire japonaise, nous pourrions assister à un mouvement de volatilité important sur les paires en JPY. Tout le monde n’est certainement pas couvert…
Les résultats d’entreprises continuent avec Lennar (constructeur de logements aux Etats-Unis), Trip.com (agence de voyage en ligne) et General Mills (alimentaire).
A 20h aujourd’hui, la Réserve Fédérale américaine publiera son communiqué et ses projections macroéconomiques. C’est à 20h30 que Jerome Powell prendra la parole. Si nous devions nous risquer à un scénario, il est probable que son intervention soit plutôt favorable au dollar américain.