En attendant Godot
Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
La séance d’hier correspondait plus à un rebond technique qu’à une embellie durable sur les indices boursiers. Il y avait toutefois quelques bonnes nouvelles promptes à redonner le sourire aux investisseurs. Le gouvernement américain a autorisé les compagnies pétrolières italienne et espagnole ENI et REPSOL à livrer du pétrole en provenance du Venezuela (qu’il faudra raffiner) vers l’Europe dès le mois de juillet afin de remplacer le brut russe. A long terme se pose toutefois la question des capacités pétrolières réelles du Venezuela après des années de sous-investissement dans les infrastructures. La possibilité d’une levée partielle des tarifs douaniers à l’égard de la Chine mis en place par l’administration Trump constitue une autre lueur d’espoir aussi. Cela va permettre de fluidifier le commerce international et de faire retomber un peu l’inflation. La réunion de la Banque Centrale Européenne (BCE) ce jeudi ne devrait pas réserver de surprises majeures, selon nous. Il faut s’attendre à un discours assez hawkish de la part de Christine Lagarde (ce qui va pousser les taux à la hausse et l’euro un peu plus haut, à très court terme). Pour se distraire, nous pourrons toujours jeter un œil sur les prévisions d’inflation à 2022 et à 2023. Mais nous savons tous qu’elles seront sûrement révisées à la hausse d’ici quelques mois.
- Il n’y avait quasiment pas d’activité à la Bourse de Paris hier. Jefferies a relevé sa recommandation à « acheter » contre « conserver » sur le titre Société Générale avec un objectif de cours à 35 euros contre 25 euros précédemment. La sortie des taux négatifs devrait soutenir le secteur bancaire européen (à condition que la crise de revenus actuelle ne se transforme pas en crise de bilan). HSBC a, en revanche, abaissé sa recommandation sur EDF à « alléger ». C’est une société qui ne devrait même pas être en bourse, selon nous. Aucun intérêt à détenir dans son portefeuille d’actions. Enfin, le mois de juin 2022 n’a strictement rien à voir avec le mois de juin 2021 en ce qui concerne les introductions en bourse sur Euronext. C’est le désert. Il y a une exception : Broadpeak. Si tout se passe bien, l’entreprise devrait effectuer sa première cotation le 13 juin prochain. C’est audacieux, étant donné le contexte de marché. Mais c’est une belle pépite. Elle fournit des logiciels à des entreprises (près de 120 dans le secteur des télécoms) qui envoient des contenus en streaming (aussi bien sur le créneau de la vidéo à la demande que sur le live). Nous surveillerons de près le parcours boursier de l’entreprise chez Saxo Banque. [Pour la petite histoire, hier nous célébrions les 209 ans de la mort du concepteur du Palais Brongniart, l’architecte Alexandre-Théodore Brongniart. Il est aussi à l’origine du célèbre cimetière du Père Lachaise.]
- Il est certainement trop tôt pour tourner complètement la page des énergies fossiles. Sans Total Energies, les résultats des entreprises du CAC 40 devraient augmenter cette année de 12%. C’est honorable. Mais ce n’est pas extraordinaire. Si on intègre les résultats du géant pétrolier, ils augmentent d’environ 23%. La réalité de la transition énergétique (en bourse également), c’est qu’aujourd’hui beaucoup d’entreprises du secteur des énergies fossiles sont essentielles pour apporter du rendement. Cela ne signifie pas qu’il faille tourner le dos à la transition. Mais qu’il faut comprendre qu’elle n’aura pas lieu en un claquement de doigts. D’ailleurs, la crise actuelle nous rappelle que, du fait de l’univers d’investissement propre à l’ESG, les fonds ESG affichent de pires performances depuis le début de l’année que les fonds classiques.
- Il n’y avait quasiment aucune statistique hier.
Ce jeudi, la réunion de la BCE va ouvrir la voie à une première hausse des taux directeurs depuis 2011, probablement d’une ampleur de 25 points de base. L’institution souhaite procéder avec doigté, c’est pourquoi une hausse de 50 points de base (évoquée par certains analystes) est exclue. La banque centrale devrait aussi annoncer la fin de son programme de rachats d’obligations à cette occasion. La première estimation de l’indice des prix à la consommation aux Etats-Unis en mai sera l’autre point d’attention cette semaine. La publication est prévue vendredi. L’inflation devrait diminuer à 8,3% en glissement annuel, selon le consensus. L’inflation sous-jacente est aussi attendue en repli à 5,9% contre 6,2% en avril. Mais les prix des loyers, des véhicules neufs et des denrées alimentaires sont susceptibles de progresser. Il est encore trop tôt pour savoir si le pic d’inflation est déjà derrière nous. En France, le gouvernement a estimé que le pic d’inflation ne serait atteint qu’en 2023…Il faut rester humble concernant les prévisions d’inflation. Le track record est souvent mauvais.
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