Arbitrages

Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
En l’espace de quatre mois, on observe des sorties record sur les actions européennes et un report des investisseurs sur les fonds alternatifs – à la recherche de rendement. Dans le marché actuel, nous retenons deux règles principales : 1) il ne faut pas être directionnel et 2) les actions et les taux deviennent la règle. Il y a encore quelques années de cela, les investisseurs se détournaient du marché obligataire. Ils y reviennent désormais. Beaucoup sont à la recherche d’outils de couverture et s’orientent sans surprise sur les actifs américains (un outil de couverture assez logique est le S&P 500, par exemple). Cela explique en partie les sorties de capitaux observées au niveau européen. Cette situation ne risque pas de s’améliorer. Le processus de durcissement monétaire engagé aux Etats-Unis (et qui va s’accélérer ce soir avec la hausse attendue de 50 points de base du taux directeur de la Réserve Fédérale) va renforcer l’attractivité des actifs américains. Il n’y a certainement pas d’autre solution que d’être surpondéré « Etats-Unis » vs « Europe » à l’heure actuelle. Mais dans ce cas-là, il faut évidemment prendre en compte l’impact du taux de change sur l’investissement final (tout porte à croire que l’euro va continuer sa dépréciation à court terme face au dollar américain, avec potentiellement un point bas à 1,02).
- Les banques centrales poursuivent leur politique de normalisation monétaire. Hier, c’était au tour de la Banque de réserve d’Australie. Conformément à ce que nous anticipions, elle a augmenté son taux directeur de 25 points de base à 0,035% (contre 0,10% précédemment). C’est clairement un message hawkish qui a été envoyé au marché. D’autres hausses de taux vont survenir afin de renouer avec la cible d’inflation de la banque centrale. Cette dernière prévoit que l’indice des prix à la consommation va atteindre le niveau vertigineux de 6% cette année. Il n’est pas improbable que nous assistions à une hausse de taux de 25 points de base à chaque réunion de politique monétaire au deuxième semestre. Le marché monétaire anticipe désormais que le taux directeur atteigne 2,5% vers mi-2023. Dans la foulée de l’annonce, le marché obligataire a vivement réagi. Le taux à 10 ans sur la dette souveraine australienne a atteint son plus haut niveau depuis novembre 2014, par exemple. Les principales valeurs de la bourse australienne (y compris les valeurs technologiques) étaient en hausse.
- On en parle peu, malheureusement. Les perturbations climatiques qui sévissent en Asie en ce moment vont entraîner des conséquences certainement dramatiques pour beaucoup de récoltes (ce qui va encore pousser les prix alimentaires à la hausse). Des records de chaleur ont été atteints au Pakistan et en Inde. Le 1er mai, la température était de 49,5°C à Nawabshah (Pakistan) et de 47.2°C à Banda (Inde), par exemple. En outre, la température moyenne à Nawabshah en avril cette année fut de 44,6°C (mois d’avril le plus chaud jamais enregistré !). A l’inverse, les températures sont exceptionnellement basses en Asie de l’Est : 16,4°C à Hong Kong notamment. Il est désormais difficile de nier le changement climatique.
Les résultats d’entreprises continuent avec ANZB, Barrick Gold, A.P. Moller – Maersk, Vestas Wind Systems, Pandora, Sampo, Airbus, EDF, Volkswagen, Siemens Healthineers, Enel, Equinor, CVS Health, Booking, Regeneron Pharmaceuticals, Uber, Marriott International, Moderna, Fortinet, Ferrari, eBay et Albema.
La conférence de presse de J. Powell est le point d’orgue de la semaine. La remontée des taux de 50 points de base est déjà intégrée dans les prix du marché (même si le taux à 10 ans des Etats-Unis continue de progresser). Les deux points d’attention majeurs aujourd’hui seront : le processus de durcissement des taux à venir (faut-il s’attendre à une hausse de 75 points de base en juin prochain ?) et les éventuelles mesures de retrait de la liquidité (cela pourrait en particulier permettre de dégonfler les prix sur le marché de l’immobilier, sachant qu’ils sont intégrés dans le calcul de l’inflation, contrairement à ce qui est fait en zone euro).