Inhabituel

Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
C’est une situation un peu inhabituelle sur les marchés financiers. Il ne se passe strictement rien sur les small caps du fait d’un manque de liquidité et de l’absence des gérants (après un premier semestre compliqué, ils ont bien mérité des vacances). Les matières premières (en particulier dans l’énergie) sont en recul en variation mensuelle. D’habitude, c’est le signe d’une récession en vue. Mais c’est certainement encore un peu trop tôt pour en juger. Il est probable que d’autres facteurs aient une influence aussi (débouclage de positions longues en particulier dans le cadre de prises de bénéfices). Enfin, ce qui est probablement le plus inattendu, c’est que la volatilité des actions est actuellement inférieure à celle des taux. C’est particulièrement rare. Cela arrive quelques fois dans le parcours d’un investisseur. Il est probable que les conditions que nous avons évoquées perdurent une grande partie de l’été. Il est évidemment beaucoup trop tôt pour savoir si les craintes de récession (qui ont remplacé la peur d’une stagflation) sont vérifiées ou pas. Les quelques statistiques qui vont tomber cette semaine (notamment concernant les Etats-Unis) sont connues pour être en décalage avec le cycle économique. En ce qui concerne les résultats d’entreprises, il n’y a strictement rien dans les séances à venir. La saison des résultats pour le deuxième trimestre commence seulement la semaine prochaine avec PepsiCo, Fastenal, Delta Air Lines, JPMorgan Chase, Morgan Stanley, Conagra Brands (agroalimentaire), PNC Financial Services (entreprise bancaire situé dans la région des Grands Lacs), UnitedHealth (assurance et soins de santé à but lucratif), Well Fargo, Charles Schwab, US Bancorp, BlackRock, State Street et Citigroup.
- S’introduire en bourse est un exercice périlleux en ce moment. La plateforme de streaming musical Deezer s’est effondrée lors de son premier jour de cotation à la Bourse de Paris (chute jusqu’à -35% sur la seule matinée de mardi). Deezer avait déjà tenté une IPO il y a sept ans de cela. Mais elle avait échoué , notamment parce que le secteur du streaming musical intéressait peu les investisseurs. Désormais, ils sont attentifs à ce nouveau segment. En revanche, les conditions de marché sont exécrables. En général, quand un titre connaît un premier jour de cotation compliqué (c’est le moins qu’on puisse dire dans le cas précis), l’intégralité de son parcours boursier est plutôt négatif par la suite. C’est prouvé dans 70% des cas. Nous doutons que Deezer soit en mesure de retrouver rapidement la confiance des investisseurs.
- Sur le marché des changes, la baisse de l’euro se poursuit. La monnaie unique a atteint hier un point bas près de la zone des 1,0240. La parité est en ligne de mire. Mais il faudra d'abord franchir le seuil technique à 1,0166. Du point de vue de l’analyse technique, l’euro n’est pas encore en zone de survente (ce qui signifie que le potentiel de rebond est limité). Pour espérer une inversion de la tendance à court terme, il faudrait que la paire EUR/USD franchisse le seuil des 1,0640. C’est un niveau éloigné. Enfin, les fondamentaux ne jouent pas en faveur de l’euro. Nous sommes dans une configuration de marché que nous connaissons bien. En période de risque d’inflation, les capitaux vont se recycler sur le marché américain (phénomène de fuite vers la qualité), ce qui soutient le taux de change de l’USD. L’année 2022 sera celle de la performance du billet vert.
- Sur le marché obligataire, la normalisation continue en zone euro. L’Espagne a emprunté hier à très court terme (échéance à six et à douze mois) à des taux positifs. Il y a encore quelques mois de cela, le pays pouvait emprunter à taux négatif sur six mois. La demande reste soutenue. C’est bien le signal que le risque de fragmentation en zone euro est plutôt limité (dit autrement, nous ne revivrons certainement pas les déboires des années 2012-2013). En revanche, les investisseurs étrangers fuient toujours le marché obligataire italien (notamment les investisseurs japonais). C’est le cas depuis le début de l’année. Il y a donc bien un risque italien qui est ‘pricé’ par les investisseurs et qui risque de se renforcer en 2023 à l’occasion des élections générales (il n’y aura plus Mario Draghi pour rassurer).
Le calendrier économique est peu chargé. Le rapport JOLTS sur les nouvelles offres d’emploi en mai est publié à 16h. C’est une statistique très en décalage avec le cycle économique et qui ne va rien nous apprendre que nous ne savons déjà sur l’état du marché du travail outre-Atlantique. Le compte-rendu de la dernière réunion de juin de la Réserve Fédérale devrait confirmer qu’une hausse de 75 points de base du taux directeur sera annoncée à l’issue de la réunion des 26 et 27 juillet. C’est déjà totalement intégré dans les prix du marché (en particulier au niveau du taux de change du dollar américain).
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