ça continue

Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
Bank of America a publié une statistique intéressante vendredi. Il s’agit de l’évolution du traditionnel portefeuille d’investissement 60/40 (60% d’actions et 40% d’obligations). La performance n’est pas mirobolante. En août, le portefeuille type a baissé de 4,60% - soit un repli depuis le début de l’année de 19,40%. Si la tendance se poursuit (ce qui n’est pas exclu), cela devrait être la pire année depuis 1936. Alors, tout n’est pas perdu. Il existe quelques stratégies plus actives afin de surmonter l’incertitude du marché. Il ne faut pas se leurrer, avoir une part en cash est important (les gérants conseillent d’avoir au moins 10% du montant de son portefeuille qui ne soit pas investi). Ensuite, le stock-picking reste certainement le meilleur moyen d’avoir de la rentabilité. Au cours des derniers mois, beaucoup d’entreprises ont eu volontairement un discours assez pessimiste sur les perspectives de croissance. Finalement, elles ne s’en sortent pas si mal que cela. Il est donc probable qu’on ait quelques bonnes surprises dans les semaines à venir au niveau du côté (aussi bien les large caps que les small et mid caps). Shorter le marché reste également toujours une possibilité. Beaucoup d’investisseurs particuliers ont adopté cette stratégie depuis le mois de février et s’en sont bien sortis. Il est probable que cela vaille encore dans les mois à venir. Nous n’anticipons pas à un rebond majeur des principaux indices. En revanche, il devrait y avoir de bonnes surprises au niveau microéconomique.
- L’emploi américain pour le mois d’août a été publié vendredi. Le ralentissement est palpable (hausse du taux de chômage à 3,7 % de la population active et diminution des créations d’emplois à 315 000 contre 526 000 en juillet). Mais ce n’est en rien inquiétant. Cela confirme plutôt un atterrissage en douceur de l’économie américaine. En outre, le marché sait très bien que les chiffres de l’emploi communiqués en première estimation en août sont traditionnellement très volatils. Ils sont fortement révisés par la suite (au cours de la deuxième et de la troisième estimation). Cela ne va en aucune façon faire dérailler le cycle de durcissement monétaire entamé par la Réserve Fédérale américaine. Par ailleurs, les anticipations d’inflation du marché à un an continuent de chuter aux Etats-Unis à 2 % (c’est le plus bas niveau depuis janvier 2021). Trois facteurs principaux expliquent cela : les anticipations de récession (ce qui va faire baisser la demande et l’inflation), le ‘succès’ attendu de la politique monétaire restrictive mise en œuvre par la Réserve Fédérale américaine et enfin l’évolution à la hausse du dollar américain. Le Dollar Index, qui mesure la fluctuation du dollar face à un panier de devises majeures, a atteint un point haut depuis vingt ans la semaine dernière. C’est un facteur déflationniste par nature. Ce mouvement de hausse du billet vert a toutes les chances de perdurer étant donné la dégradation économique à venir.
- Sur le marché des devises, la volatilité s’accentue. Dans la nuit de jeudi à vendredi, le yen japonais a franchi le seuil psychologique des 140 face au dollar américain. La monnaie nippone se rapproche de la zone des 146 - niveau à partir duquel les Etats-Unis et le Japon sont intervenus de manière conjointe en 1998. Toutefois, il aura fallu la crise financière de 1998 (qui a été déclenchée par la faillite du fonds à fort effet de levier Long Term Capital Management - LTCM) pour que le yen se renforce durablement. Cela montre les limites des interventions sur les taux de change par les autorités, même lorsqu’il s’agit d’action coordonnée.
Les résultats d’entreprises continuent cette semaine avec Ashtead Group (mardi), People’s Insurance Co Group, Exor, Copart, NIO (mercredi), Sun Hung Kai Properties, Zscaler, Docusign (jeudi) et Dollar Stores (vendredi).
La réunion de la Banque Centrale Européenne est le point d’orgue de la semaine (jeudi). A l’exception du chef économiste Philip Lane, tous les principaux membres de la BCE ont plaidé vigoureusement au cours des dix derniers jours (depuis Jackson Hole) en faveur d’une action vigoureuse pour la réunion de septembre (dit autrement, hausse de taux de 75 points de base). Cela a permis d’alimenter le rebond technique de l’euro jeudi dernier. Mais ce sera certainement insuffisant pour inverser la tendance. Au regard des nombreux risques pesant sur la zone euro (crise énergétique, récession, inflation galopante un peu partout), on voit mal comment l’euro pourrait durablement renouer avec les 1,03 par exemple (niveau de mi-juillet). La probabilité que la zone euro s’enfonce dans un appauvrissement progressif est élevée, selon nous. Ça, c’est dit.
Actualité des marchés en temps réel
Clause de non-responsabilité