Prévisions chocs
Une entreprise du classement Fortune 500 nomme un modèle d’intelligence artificielle comme directeur général.
Charu Chanana
Responsable de la Stratégie Investissement
Investment Strategist
Si vous avez l’impression que votre banque change de nom tous les quelques années, ce n’est pas qu’une impression. Partout en Europe, les établissements fusionnent et se reconfigurent, redessinant progressivement la manière dont l’épargne circule et dont le crédit est distribué. Pour la plupart des clients, ces évolutions se traduisent par un nouveau logo. Pour les observateurs des marchés, elles montrent une transformation discrète mais structurante du paysage bancaire. En 2025, la valeur des opérations est déjà nettement supérieure à celle de 2024. Dans un contexte de taux plus élevés, d’investissements technologiques coûteux, d’exigences renforcées en matière de cybersécurité et de réglementation toujours plus stricte, de nombreuses banques cherchent à atteindre une taille plus efficiente. La majorité des transactions restent des rapprochements nationaux ciblés, loin des grands “champions européens” imaginés à Bruxelles, freinés par des cadres juridiques différents et des considérations politiques fortes. Pour les investisseurs, ces mouvements peuvent conduire à des structures plus efficaces ou à des distributions plus généreuses, mais ils s’accompagnent également de défis opérationnels, réglementaires et politiques. Une approche diversifiée et un horizon de temps long permettent généralement de mieux naviguer dans ces phases de transition.
Les mécanismes économiques sont simples. Une banque plus grande peut fermer des agences en doublon, réduire certaines fonctions centrales et répartir les coûts importants liés aux technologies et à la conformité sur un nombre plus large de clients. La Banque centrale européenne encourage d’ailleurs davantage de consolidation pour rendre le système plus solide et moins fragmenté.
Mais les réalités politiques et juridiques maintiennent la plupart des opérations à l’intérieur des frontières. Les gouvernements souhaitent des banques plus robustes, tout en protégeant l’emploi local, les agences et leur propre influence. C’est pourquoi Fitch anticipe une prédominance des rapprochements domestiques, tandis que les fusions transfrontalières restent limitées.
Cette dynamique crée une Europe à trois vitesses. Certains pays, comme l’Italie, avancent vite, souvent avec une part de tensions. D’autres, comme le Danemark, opèrent des regroupements de manière plus ordonnée. Les grands systèmes comme l’Espagne, la France et l’Allemagne évoluent entre les deux, mêlant tentatives ambitieuses et réorganisations internes progressives.
L’Italie illustre le plus clairement la recomposition bancaire européenne. Monte dei Paschi di Siena (MPS) cherche à racheter Mediobanca, créant ainsi un potentiel troisième pilier aux côtés d’Intesa Sanpaolo et UniCredit.
Derrière cette opération se trouve un cercle d’actionnaires influents, dont Delfin et Francesco Gaetano Caltagirone, présents au capital de MPS, Mediobanca et Generali. Les médias italiens surnomment ce réseau le « salotto buono », une sorte d’arrière-salle feutrée où se négocient les grandes opérations.
Plusieurs sources rapportent également que le parquet de Milan examine d’éventuelles collusions ou manipulations de marché autour de l’offre. Cela rappelle que les risques de gouvernance et de conduite peuvent se trouver à proximité immédiate de logiques financières pourtant solides.
Le Danemark offre une version plus disciplinée du même mouvement. Sydbank, Arbejdernes Landsbank et Vestjysk Bank prévoient de former AL Sydbank, l’un des plus grands prêteurs du pays. L’objectif est une montée en puissance dans un marché de petite taille mais très concurrentiel : moins d’agences doublonnées, une informatique mutualisée et plus de moyens pour moderniser le digital. Ici, les principaux risques concernent l’exécution et la culture, plutôt que la politique.
L’Espagne montre ce qui arrive lorsque de grandes ambitions se heurtent à des limites politiques. BBVA a lancé une offre hostile sur Banco Sabadell pour créer l’une des plus grandes banques de détail en Europe. Après une longue bataille, seule une minorité d’actionnaires de Sabadell a soutenu l’opération, tandis que le gouvernement exprimait déjà des inquiétudes sur l’emploi et la concentration locale. Une fusion juridique complète aurait en outre entraîné un gel de plusieurs années.
La France opte pour une consolidation interne plus discrète. Société Générale regroupe son réseau de détail avec celui du Crédit du Nord sous la marque unique SG, avec un objectif clair : réduire les coûts en fermant les agences et systèmes en doublon.
L’Allemagne reste un pays où coexistent de nombreux établissements. Les caisses d’épargne et les banques coopératives dominent toujours le financement local, souvent en lien étroit avec les autorités régionales. Le nombre d’institutions continue de diminuer au fil des années, les plus fragiles fusionnant avec les plus solides, mais le processus reste progressif plutôt que spectaculaire.
Dans l’ensemble de ces pays, un point commun se dégage : la consolidation domestique est généralement acceptée, voire encouragée, tant qu’elle ne provoque pas de tensions visibles. Les opérations transfrontalières demeurent complexes, et les gouvernements surveillent de près toute transaction susceptible de modifier le « drapeau » sur le siège d’une banque nationale.
Le premier risque concerne l’exécution. Les migrations informatiques, les changements de marque ou la fermeture d’agences sont des projets complexes. Des initiatives comme celles de SG en France ou d’AL Sydbank au Danemark nécessitent plusieurs années de travail rigoureux avant que les économies annoncées n’apparaissent réellement dans les comptes.
Le deuxième risque touche à la gouvernance. Les enquêtes menées en Italie autour de MPS et Mediobanca illustrent comment des cercles d’actionnaires très soudés, des tactiques agressives ou une communication insuffisante peuvent conduire à des difficultés juridiques ou réglementaires.
Le troisième risque est politique. Les gouvernements peuvent retarder ou bloquer certaines opérations, comme en Espagne, ou imposer des conditions qui réduisent les bénéfices attendus. Les régulateurs peuvent aussi demander aux banques issues d’une fusion de détenir davantage de capital, ce qui peut freiner la progression des distributions.
Pour les investisseurs de long terme, la consolidation se comprend davantage comme un cadre d’analyse que comme une opportunité immédiate :
La vague de fusions est bien réelle en Europe, mais elle ressemble davantage à un redécoupage progressif des frontières existantes qu’à l’émergence d’un grand marché unifié. Plutôt que quelques champions continentaux, on observe des groupes nationaux plus solides, des structures internes simplifiées et une multitude de regroupements locaux qui ne prennent sens que lorsqu’on dézoome. Pour les clients, cela se traduit souvent par un nouveau logo et moins d’agences. Pour les investisseurs, c’est un mélange de gains potentiels d’échelle, d’une capacité de distribution renforcée et de risques très différents selon les pays en matière de gouvernance et de politique.
Dans un environnement où le nom de votre banque peut changer plus souvent que votre taux de crédit immobilier, l’enjeu n’est pas de deviner la prochaine grande fusion, mais de comprendre qui contrôle réellement chaque établissement, la qualité de son exécution et la résilience de votre portefeuille si la carte bancaire européenne continue de bouger. Ce document est un contenu à visée marketing et ne doit pas être considéré comme un conseil en investissement. Le trading d’instruments financiers comporte des risques, et les performances passées ne garantissent pas les résultats futurs. Les instruments mentionnés dans ce document peuvent être émis par un partenaire dont Saxo perçoit des commissions, paiements ou rétrocessions. Bien que Saxo puisse être rémunéré dans le cadre de ces partenariats, tout le contenu est rédigé dans le but de fournir aux clients des informations utiles.