Sans surprise
Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
C’est un marché boursier sans surprise auquel nous faisons face. Les banques et les valeurs du luxe continuent de porter la cotation (même s’il y a des prises de bénéfices logiques sur les valeurs du luxe). Nous pensons que la surperformance de l’indice parisien va continuer dans les semaines à venir. La hausse actuelle n’est pas complètement saine puisqu’elle est portée essentiellement par quelques titres. On pourrait craindre donc que ce soit un feu de paille. Mais si on regarde du côté américain, pendant plusieurs trimestres, ce sont uniquement quelques valeurs technologiques qui ont porté la hausse. Par conséquent, cela peut durer longtemps. On constate également que la fragilité des banques régionales américaines n’est plus un sujet pour les investisseurs. C’est une bonne nouvelle puisqu’il n’y a pas de risque systémique.
- La Chine a enregistré une forte croissance de 4,6% sur un an au premier trimestre. C’est mieux que le consensus (4%). Mais c’est en trompe l’œil. En effet, si nous enlevons l’effet de base, la croissance chinoise est certainement en-dessous de 3%. Nous avons connu exactement la même chose lorsque nos économies sont sorties de la période de confinement Covid. En outre, plusieurs statistiques montrent que des pans de l’économie sont encore fragiles. Les chiffres de la balance commerciale qui ont été publiés la semaine dernière ont montré une forte progression des exportations. Mais celle-ci s’explique principalement par les mesures de soutien importantes des gouvernements locaux aux exportateurs. Pour l’instant, la consommation ne tire pas les importations. Dans une économie saine, la locomotive de l’économie est justement la consommation. Ce n’est pas encore le cas en Chine. Ce le sera certainement dans les mois à venir. Le chômage des jeunes reste un des points noirs (proche de 20% au mois de mars) tout comme l’investissement des entreprises qui grimpe mais très lentement. Cela reflète surtout une crainte dans l’avenir et aussi des conditions d’accès au crédit qui sont certainement encore trop restrictives. Nous ne pensons pas que la Chine jouera à court terme le rôle de moteur de la croissance mondiale comme l’espéraient beaucoup d’analystes. En revanche, il est évident que la croissance chinoise va s’étoffer dans les mois à venir (en particulier sous l’angle des exportations).
- Plus proches de nous, les chiffres de l’emploi au Royaume-Uni sont mitigés. Le taux de chômage a augmenté plus que prévu, à 3,8% (point haut depuis le T2 2022). C’est un peu plus que ce qu’attendaient les analystes. Mais la dynamique reste encore positive. Pour preuve, la croissance des salaires est toujours soutenue. La croissance annuelle des salaires sur la période novembre 2022 à janvier 2023 a été de 5,9% (contre un consensus à 5,1%). En outre, le différentiel de rémunération continue de s’accroître entre le secteur public et le secteur privé (sans surprise, c’est dans le secteur privé que la progression est la plus conséquente). En termes de politique monétaire, nous nous attendons toujours à ce que la Banque d’Angleterre augmente son taux directeur de 25 points de base lors de sa prochaine réunion.
- Le marché voit surtout le verre à moitié plein en ce moment et ne se focalise pas sur les résultats mitigés des banques régionales américaines. Ces dernières ont annoncé une forte baisse de leurs dépôts (évidemment !). Charles Schwab, qui a été fortement sous pression pendant la crise bancaire, a annoncé un bénéfice par action en ligne avec les attentes à 0,93 USD. Mais le broker a aussi annoncé une baisse conséquence de ses dépôts au premier trimestre (de 366 milliards USD à 325 milliards USD). De son côté, State Street a déçu avec une baisse du fait d’une baisse de ses dépôts et de son chiffre d’affaires net d’intérêt. Ses clients ont retiré par moins de 26 milliards de dollars au cours du premier trimestre (essentiellement au niveau des produits financiers proposés). Le marché ne s’attendait à une fuite des capitaux que de 8 milliards d’euros. Le titre est en baisse de plus de 10% sur les trois derniers mois. Il est vraisemblable que le segment des banques régionales connaisse un lent et parfois douloureux processus de fusions-acquisitions dans les mois et les années à venir. Le risque systémique est faible de notre point de vue. En revanche, il y aura certainement des remous sur le segment de l’immobilier commercial (c’est le cœur de business de beaucoup de banques régionales américaines).
Les résultats d’entreprises continuent avec Metro (groupe de distribution allemand), ASML (un des leaders mondiaux de la fabrication de machines de photolithographie pour l'industrie des semi-conducteurs), Heineken, Tesla, Abbott Laboratories (santé), Morgan Stanley, IBM, Lam Research (fabrication d’équipements pour le secteur des semi-conducteurs) et US Bancorp (banque régionale avec un siège à Minneapolis).
C’est une séance calme sur le front des statistiques avec principalement l’indice des prix à la consommation en zone euro au mois de mars. Comme il s’agit d’une seconde estimation, il n’y a aucune surprise à attendre. Le marché prévoit un chiffre stable à l’estimation initiale à 6,9% sur un an. C’est encore trop élevé pour la Banque Centrale Européenne.
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