FED : Le choix est vite fait
Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
Ce qu’il faut retenir de la réunion du FOMC c’est (1) qu’il n’y avait pas de surprise majeure. Le FOMC a décidé à l’unanimité qu’il était nécessaire d’augmenter le taux directeur de 25 points de base entre 5,00-5,25 % et (2) d’opérer une pause de politique monétaire car le mouvement de hausses commence à avoir des effets néfastes sur l’activité économique – sous-entendu, sur le secteur bancaire en particulier. Plus d’une douzaine de banques régionales font face à une pression de marché importante. Si on se base uniquement sur l’évolution du cours de bourse et sur les credit default swaps, la PacWest Bancorp (basée en Californie) pourrait être la prochaine banque régionale à avoir besoin d’un soutien de la part des autorités et qui pourrait être rachetée, à bas coût, par un acteur bancaire plus important. Tout cela va évidemment peser sur les conditions de crédit - un point mis en avant par le communiqué du FOMC. Il y a également un autre sujet d’incertitude qui a certainement pesé : les discussions difficiles entre le Congrès et le Trésor sur le relèvement du plafond de la dette. Si le 1er juin prochain, un accord n’est pas trouvé, les Etats-Unis pourraient être en défaut de paiement. C’est peu probable, bien-sûr. En l’espace d’un peu plus de vingt ans, le plafond de la dette a été relevé à vingt reprises. Ce sera également le cas cette fois-ci. Un accord à l’arraché sera trouvé. En revanche, le psychodrame politique pourrait continuer encore quelques semaines, ce qui va avoir pour effet de durcir encore davantage les conditions financières. Le FOMC n’avait finalement pas d’autre choix que d’opérer une dernière hausse avant une pause de politique monétaire, même si l’inflation est loin d’être à un niveau optimal. Celle-ci recule comme on le constate sur le graphique ci-dessous. C’est particulièrement le cas au niveau des biens. En revanche, l’inflation au niveau des services ne montre pas de signe de baisse réelle. Pire, l’indice PCE Service – la mesure préférée de l’inflation de J. Powell – est autour de 4,5 % sur un an et ne recule pas vraiment. Powell, comme les autres membres du FOMC, privilégient l’indice PCE pour plusieurs raisons : données historiques qui peuvent être révisées, couverture plus complète des services que l’indice des prix à la consommation, pondération des dépenses qui est ajustée régulièrement. Dans les prochains mois, ce sera l’indicateur d’inflation à surveiller pour savoir combien de temps la pause de la Fed va durer.
La réaction du marché est un peu déconcertante. Sans surprise, la perspective d’une première baisse de taux est désormais plus proche – baisse de taux prévue en septembre 2023 contre novembre 2023 avant le FOMC. C’est plus court que la moyenne des autres périodes de pause de politique monétaire. Mais ce qui est surprenant c’est que le marché anticipe l’enclenchement d’un cycle de baisse avec une croissance du PIB qui continue de progresser (pas de récession), une inflation qui devrait renouer avec la cible à 2% et des résultats d’entreprises qui progresseraient. C’est incohérent, bien-sûr. Un atterrissage en douceur ne fait pas sens avec l’hypothèse d’une baisse des taux. Il y aura donc un ajustement tôt ou tard des anticipations du marché.
Du point de vue du Forex, la réunion du FOMC ne change pas le donne. La faiblesse du dollar américain, qui a été un élément marquant au premier trimestre, devrait perdurer. C’est plutôt positif pour le franc suisse. Juste avant le FOMC, la paire USD/CHF avait franchi à la baisse la zone psychologique située autour de 0,90. La pression baissière devrait être renforcée par l’issue de la réunion de la banque centrale. A court terme, on ne peut pas exclure quelques prises de bénéfices. En effet, on constate que le franc suisse est l’une des monnaies du G10 qui subit la plus forte pression acheteuse au cours des derniers mois. C’est en général lorsqu’on a un positionnement extrême sur une devise qu’on peut avoir des renversements de tendance ou, a minima, des prises de profit importantes. Cela peut survenir. A moyen terme, la tendance reste fermement baissière sur l’USD/CHF.
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