3.3% ! Sérieusement ?
Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
Il faut se féliciter des rares journées boursières en hausse car ça ne dure pas. Nous restons convaincus chez Saxo Banque que la période de baisse du CAC 40 est encore loin d’être terminée. Il sera très difficile de rattraper la chute de près de 18% de l’indice parisien depuis le début de l’année. Les segments prometteurs à long terme se font massacrer (ce sont notamment les small caps qui sont sur des segments disruptifs comme le décryptage du génome et encore l’intelligence artificielle). A très court terme, tant que le marché parisien ne chute pas sous les 5858 points, il y a l’espoir que le rebond technique dure un peu. En cas de cassure, il faudra s’attendre à une accélération de la baisse. Dans l’immédiat, le marché va surtout surveiller la publication de l’indice de confiance de l’Université du Michigan pour le mois de juin (version finale). Les anticipations d’inflation à cinq et à dix ans seront scrutées de près (l’anticipation d’inflation à 3,3% en estimation initiale avait affolé dans les salles de marché – c’est un niveau supérieur à 2008). Cet indicateur aura évidemment une influence sur la décision de politique monétaire de la Réserve Fédérale américaine (Fed) pour juillet.
- Il y avait peu de statistiques hier. En revanche, les banques centrales continuent d’occuper le terrain. La Banque centrale de Norvège a rejoint la cohorte de banques centrales ayant durci agressivement sa politique monétaire. Le taux directeur principal a été augmenté d’un demi-point, à 1,25%. C’est la plus forte hausse depuis vingt ans. La banque centrale avait initialement laissé entendre qu’elle opterait pour une démarche moins agressive (25 points de base). Mais l’évolution sur le front de l’inflation récemment l’a contrainte à être plus offensive. D’autres hauses sont à venir, probablement d’ampleur similaire dans un premier temps. "Une hausse plus rapide des taux aujourd'hui réduira le risque que l'inflation reste élevée et la nécessité d'un resserrement plus marqué de la politique monétaire à l'avenir", a indiqué la gouverneure Ida Wolden Bache dans un communiqué. La banque centrale table sur une inflation à 3,2% cette année et à 3,3% l’an prochain – soit nettement au-dessus de sa cible.
- Le yen a repris temporairement du terrain hier suite à l’interview de l’ancien responsable des changes au ministère des Finances japonais, Takehiko Nakao, qui a laissé entendre qu’une intervention directe sur le FX par la Banque du Japon ne peut pas être exclue. Cela fait plusieurs semaines que cette rumeur circule dans les salles de marché. La dépréciation de la monnaie nippone est unanimement perçue comme négative car elle contribue fortement à la hausse de l’inflation importée. Le niveau actuel du yen n’est d’ailleurs plus un élément de soutien du bénéfice des entreprises exportatrices. Selon nous, une intervention sur les changes est probable d’ici la fin du troisième trimestre si le panorama sur le FX ne change pas. En revanche, il est peu probable qu’elle soit couronnée de succès. Seule une hausse du taux directeur (qui n’est pas sur la table, pour le moment) pourrait durablement soutenir le yen.
- Le mot récession fait son retour. La dernière enquête auprès des prévisionnistes professionnels pour les Etats-Unis montre une probabilité de récession de 20%. En règle générale, lorsque nous sommes à ce niveau, l’économie est déjà en récession. Les économistes ont un mauvais track-record pour prévoir les retournements de cycle (il faut bien le reconnaître). Il n’y a que deux exceptions : au début des années 1980, lorsque le président de la Fed, Paul Volcker, a augmenté brutalement les taux afin de faire dégringoler l’inflation (mais c’était si évident que même les économistes ont pu prévoir la récession) et en 1995 lorsqu’elle s’est soldée par un atterrissage en douceur. A l’heure actuelle, la récession n’est pas notre scénario central pour les Etats-Unis. Nous tablons sur un ralentissement brutal qui devrait s’amplifier en 2023. L’ampleur de la baisse de la croissance va fortement dépendre de l’évolution du marché de l’immobilier (qui est un facteur central influençant le cycle économique et des affaires). Les derniers chiffres portant sur le mois de mai sont inquiétants.
Les résultats d’entreprises continuent avec Carnival (croisières), China Gas (hydrocarbures) et CarMax (véhicules d’occasion).
L’indice IFO du climat des affaires en Allemagne en juin est publié aujourd’hui. L’indice principal est attendu en légère baisse, à 92,9 contre 93,0 le mois précédent. La dynamique économique reste préoccupante en Allemagne. Mais on observe ici et là des signes d’amélioration. Dans le secteur automobile (qui contribue à hauteur de 14% au PIB allemand), les principaux constructeurs ont réussi à sécuriser leur chaîne d’approvisionnement permettant ainsi un redémarrage de la production. C’est un signal positif pour le troisième trimestre.
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