Du sang

Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
On ne peut pas être surpris que les indices chutent étant donné l’accroissement des risques. Citons-en quelques-uns : inflation durable, tension sur la dette des émergents (nous en parlions vendredi dernier), récession (le risque s’accroît en particulier pour le Royaume-Uni), guerre des devises (le Japon s’inquiète de la baisse du yen) et enfin risque géopolitique. Il est donc normal qu’on assiste à une fuite des investisseurs. Selon les données fournies par Bank of America, les marchés actions ont connu la plus forte baisse de flux en hebdomadaire depuis le début d’année la semaine dernière. Ce n'est peut-être que le début. L’année 2022 devrait être une année de transition sur le plan économique. Soit nous parvenons à surmonter les nombreux défis qui apparaissent, soit nous allons droit vers une récession. Pour l’instant, la récession n’est clairement pas notre scénario de base. Mais le risque s’accroît rapidement dans certains pays.
- Les statistiques étaient nombreuses lors de la séance de vendredi dernier. Les indicateurs britanniques renforcent le risque de récession outre-Manche. L’indice de confiance du consommateur GfK pour le mois d'avril s’est effondré à -38 contre une estimation à -33 et -31 en mars dernier. Les ventes au détail ont fortement chuté également (-1,4% en variation mensuelle). Elles restent toujours supérieures de 2,2% à leur niveau d’avant-pandémie. Mais la tendance n’est pas positive. Une hausse des taux par la Banque d’Angleterre de 50 points de base en mai (c’est le consensus du marché) nous paraît exclue, au regard de ces statistiques. Cela aurait pour conséquence de fragiliser encore plus l’activité économique britannique. En zone euro, les indicateurs PMI (estimation flash) étaient bien orientés, à la surprise générale. L’indicateur composite pour l’Union monétaire a augmenté à 55,8 en avril contre 54,9 en mars. La hausse a été essentiellement tirée par la bonne dynamique dans le secteur des services. La croissance dans le secteur manufacturier a en revanche chuté à un point bas de 22 mois à cause des pressions inflationnistes qui atteignent un niveau record. Les problématiques liées à l’Ukraine semblent peu influencer l’activité.
- Le président de la Réserve Fédérale américaine, Jerome Powell, a clairement plaidé en faveur d’une hausse de 50 points de base du taux directeur à l’issue de la réunion du 4 mai prochain. C’est en ligne avec les attentes du marché. Certaines grandes banques anticipent même une accélération du rythme de normalisation avec deux hausses de taux de 75 points de base chacune en juin et en juillet (Nomura). Ce n’est pas un scénario farfelu étant donné la forte progression de l’inflation (qui pourrait atteindre 10 % d’ici au mois de juin), selon nous.
- Les investisseurs anticipent le plus puissant cycle de durcissement monétaire aux Etats-Unis depuis quarante ans et, en même temps, les anticipations d’inflation continuent de grimper. Celles à cinq ans, qui sont observées de près, ont atteint leur plus haut niveau depuis 2014 vendredi dernier.
La saison des résultats continue avec Deutsche Boerse, Philips, Coca-Cola, Activision Blizzard (développeur et éditeur de jeux vidéo) et Cadence (informatique). Les pénuries de composants (métaux et puces, par exemple) restent le principal sujet d’attention ce trimestre. Cela risque d’empirer dans le cours de l’année.
L’indice IFO du climat des affaires est publié à 10h00 pour l’Allemagne. Le consensus prévoit une légère baisse en raison des perturbations occasionnées par la guerre en Ukraine, en particulier au niveau des chaînes d’approvisionnement (perspectives : 82,3 ; situation actuelle : 95,0). Les conséquences de cette publication sur les marchés boursiers devraient être marginales.