Prévisions chocs
Une entreprise du classement Fortune 500 nomme un modèle d’intelligence artificielle comme directeur général.
Charu Chanana
Responsable de la Stratégie Investissement
Les méga-contrats à plusieurs dizaines, voire centaines de milliards de dollars dans l'IA suscitent des interrogations
Si les promesses d'une révolution technologique en cours, celle de l'IA, continuent de porter les indices américains à de nouveaux sommets historiques, certains observateurs commencent à s'inquiéter des « accords circulaires » conclus par les géants technologiques. Ceux-ci pourraient, en effet, donner une perception gonflée de la réelle demande d'IA.
La course à l'intelligence artificielle (IA) est lancée et se traduit par une véritable orgie de « méga-contrats » entre les mastodontes technologiques, notamment américains. Des sommes astronomiques, se chiffrant en dizaines, voire centaines de milliards de dollars, sont engagées dans des partenariats, investissements et autres types d'accords redessinant ces derniers mois le paysage technologique. Ceux-ci impliquant les entreprises parmi les mieux valorisées au monde (Nvidia, Oracle, Meta, etc.), ils présentent, par ricochets, des enjeux considérables pour les marchés mondiaux. L’un d’entre eux est simple : qui dominera l'IA règnera sur l'économie du XXIe siècle. C'est du moins la perception des investisseurs, qui « achètent » pour l'heure la « hype » entourant cette technologie particulièrement prometteuse.
Des contrats pharamineux
Cela se constate à chaque annonce de nouveau partenariat impliquant les acteurs mentionnés précédemment, ou d'autres comme OpenAI et le fournisseur d'infrastructures cloud spécialisés dans les charges de travail liées à l'IA, CoreWeave, également très actif. Les montants donnent le vertige et permettent de mesurer l'ampleur du phénomène. Le 10 septembre, Oracle a en effet ébahi le marché en faisant état d'un bond de 359% des revenus contractuels non comptabilisés de son pôle d'infrastructures cloud, à 455 milliards de dollars. Cette manne inclut, notamment, un contrat signé avec le créateur de ChatGPT, OpenAI, qui s'est engagé à acheter pour 300 milliards de dollars de puissance de calcul à la société dirigée par Larry Ellison, selon des sources proches du dossier. Cet accord s'inscrit dans le cadre du projet Stargate à 500 milliards dévoilé en janvier par Donald Trump et visant à construire des centres de données nouvelle génération, capables de supporter les immenses charges de travail liées à l'IA.
De son côté, Nvidia, le maître incontesté des puces graphiques (GPU), moteurs de cette révolution technologique en raison de leur capacité à accélérer les processus d'entraînement des modèles d'IA, a fait part d'un investissement pouvant atteindre 100 milliards dans OpenAI. En échange, l'entreprise dirigée par Sam Altman continuera à lui acheter des millions de GPU. Les autres géants technologiques ne sont pas en reste. Meta, la maison mère de Facebook, projette de dépenser 14,2 milliards de dollars en services cloud auprès de CoreWeave, selon un accord conclu cette semaine. Oracle serait également en pourparlers avec Meta pour un contrat d'une valeur de 20 milliards et le groupe dirigé par Mark Zuckerberg a, par ailleurs, remporté, fin août, un contrat à 10 milliards avec Google Cloud pour accéder aux infrastructures informatiques dédiées à l'IA de la filiale d'Alphabet.
Une circularité dérangeante ?
Bien que porteurs d'innovation et de croissance, ces « méga-contrats » suscitent toutefois quelques interrogations. Certains observateurs, souvent des voix discordantes au sein du concert d'éloges alimentant l'euphorie observée à Wall Street sur le compartiment technologique, pointent en effet la structure quelque peu bancale de ces montages. « L'opération entre Nvidia et OpenAI alimente le débat sur la circularité de ces flux financiers, les fonds injectés par le premier cité servant in fine à acheter ses propres puces, ce qui pourrait accentuer le risque de bulle dans l'IA », jugeaient les économistes d'Edmond de Rothschild Asset Management dans une note publiée en début de semaine dernière. Il existe, en outre, plusieurs niveaux d'imbrication. Nvidia investit par exemple dans OpenAI, qui achète des services à un fournisseur de services cloud dans lequel le fabricant de puces a également investi, comme CoreWeave, qui, lui, acquiert (ou loue) à son tour des GPU.
Pour certains investisseurs chevronnés, ce type d'accords circulaires constitue un écho inquiétant des bulles technologiques passées, en particulier celle des télécoms à la fin du XXe siècle, lors de laquelle les fabricants d'équipements (Cisco, Lucent, etc.) prêtaient des fonds à leurs clients pour qu'ils achètent et déploient ceux-ci. « L'accord entre OpenAI et Nvidia alimentera clairement ces inquiétudes », avançait Stacy Rasgon, analyste chez Bernstein, en début de semaine.
Conseil :
Nous sommes acheteurs de Nvidia, de Meta et d'Oracle en raison de leurs fortes perspectives de croissance, alimentées par l'IA, avec des cibles respectivement fixées à 230 dollars, 900 dollars et 370 dollars.